Les analystes ont revu à la hausse les prévisions de bénéfices du principal indice boursier sud-africain, qui ont atteint leur plus haut niveau depuis près de 11 ans. Les gestionnaires de fonds affirment qu’il s’agit d’une fausse piste.
La prévision moyenne des bénéfices sur 12 mois de l’indice FTSE JSE Africa All Share Index a augmenté de 4 % en dollars cette année jusqu’au 31 mai, pour atteindre son plus haut niveau depuis 2012. Elle a également atteint un niveau record en monnaie locale. Ces hausses sont intervenues alors que les estimations pour l’ensemble des actions des marchés émergents ont baissé de 1,4 %.
Mais en raison d’une bizarrerie dans l’indice de référence sud-africain, qui comprend de nombreuses sociétés étrangères, les projections de bénéfices s’appuient fortement sur les perspectives de croissance en dehors du pays – allant des ventes de produits de luxe en Asie au commerce numérique en Europe. Certaines révisions à la hausse des bénéfices, de moindre importance, reflètent la hausse du cours de l’or. Au-delà de cette façade positive, l’économie sud-africaine reste paralysée par des pénuries d’énergie et une inflation élevée, a déclaré Ashish Chugh, un gestionnaire de fonds chez Loomis Sayles & Co. à Boston.
« L’optimisme des analystes est déplacé et s’appuie sur des attentes plus élevées que raisonnables pour la reprise après le rationnement sévère de l’électricité qui a frappé l’économie au cours des deux dernières années », a déclaré M. Chugh dans des commentaires envoyés par courrier électronique. « Nous sommes moins optimistes quant aux perspectives de reprise des bénéfices en Afrique du Sud et nous nous attendons à des dégradations progressives à partir de maintenant.
L’Afrique du Sud a été confrontée à des pannes d’électricité en continu alors que le service public de l’énergie, lourdement endetté, lutte pour faire fonctionner son parc vieillissant de centrales électriques. Pendant ce temps, l’inflation dépasse largement la fourchette cible de la banque centrale, l’incitant à plus que doubler son taux de référence à 8,25 % en deux ans, ce qui constitue une contrainte supplémentaire pour l’économie. La South African Reserve Bank a réduit ses perspectives de croissance économique pour 2023 à 0,3 %, tandis que le Fonds monétaire international prévoit une expansion de 0,1 %.
Chugh a déclaré que les entreprises ayant des activités à l’étranger et qui ne dépendent pas de l’économie nationale représentent près de la moitié de l’indice principal des actions de Johannesburg en termes de poids. Une grande partie de l’attrait limité du marché en matière d’investissement provient de ces actions, mais elles constituent un pari sur certains pans de l’économie mondiale, plutôt que sur l’Afrique du Sud.
Richemont, le conglomérat suisse du luxe, est le titre le plus important de l’indice sud-africain, avec une pondération d’environ 19%. Les projections de bénéfices pour le propriétaire de Cartier ont augmenté de 16% cette année, les poussant à un niveau record dans les données remontant à 2005.
D’autres entreprises étrangères telles que Prosus, un investisseur technologique basé à Amsterdam, et British American Tobacco ont également vu leurs perspectives de bénéfices revues à la hausse. Les estimations ont été relevées pour Gold Fields, Harmony Gold Mining et DRDGold, aidées par la progression de 7,7 % du lingot en 2023.
Entre-temps, les prévisions de bénéfices pour la plupart des entreprises locales ont été revues à la baisse.
« Au cours des derniers mois, une divergence dans les prévisions de bénéfices s’est développée », ont déclaré les gestionnaires Hannes van den Berg et Rehana Khan du Ninety One Equity Fund. « Les inquiétudes concernant les perturbations de l’approvisionnement en électricité ainsi que le resserrement des conditions monétaires ont entraîné une modération des attentes pour les entreprises sud-africaines. »
La hausse de 5,3 % de l’indice de référence de Johannesburg cette année a été presque entièrement portée par des entreprises dont les principaux sièges sociaux sont à l’étranger, laissant les entreprises locales à la traîne. La hausse de plus de 30% de Richemont, société cotée à Zurich, représente 90% de la performance de l’indice, suivie par les sociétés aurifères avec des contributions plus modestes.
Les gestionnaires de fonds prévoient que les gains au niveau de l’indice vont diminuer cette année.
« Il sera probablement difficile de maintenir la reprise jusqu’à ce que la Banque de réserve sud-africaine commence à réduire les taux d’intérêt, que le délestage soit significativement réduit, que l’économie retrouve une croissance réelle et que l’environnement macroéconomique mondial devienne plus favorable », a déclaré Peter Takaendesa, responsable des actions chez Mergence Investment Managers au Cap. « Nous ne prévoyons pas de rendements à court terme pour le marché des actions, mais nous nous concentrons sur la recherche d’entreprises de qualité qui se négocient à des prix inférieurs à notre évaluation de leur valeur intrinsèque à long terme.
2023 Bloomberg
Retour à l’accueil Worldnet
